L’année 2010 est perçue par beaucoup d’observateurs comme l’année des premières élections crédibles et transparentes en République de Guinée. Même si le ‘‘simulacre’’ auquel le peuple a assisté est d’une grossièreté sans nom.
2010, c’est aussi le point de départ d’une vague de contestations tout azimut des forces politiques, sociales puis comme les deux sont imbriquées en Guinée, politico-sociale aussi . Conséquence directe : Le peuple ne fait plus confiance ni aux politiques, ni aux organisations de la société civile, voilà la radioscopie de la situation.
Un niveau de vie délétère et des plus méprisables
A voir la misère, où le guinéen lambda végète aujourd’hui, on est scandalisé, révolté, ahuri et étonné, ceci est inacceptable voire insoutenable. La fin de règne du vieux général Conté passe pour un paradis à côté du règne ‘’jaune’’ suivez mon regard. Corruption, gabegie, repli identitaire, médiocrité n’auront pas autant fait la peau à la Guinée et au même moment.
La Guinée est certes riche de fabuleux sol et sous-sol mais depuis toujours. Une minorité a pillé, torpillé et bradé toutes les ressources sans aucune inquiétude , alors même que les priorités se bousculent dans l’attente d’une potion magique qui ramènera les choses à l’endroit.
Un pays pris en otage par la politique à outrance
Après le ‘’miracle’’ électoral ayant porté Alpha Condé au pouvoir en 2010, la ‘’démocratie rue -publicaine’’ a vu le jour en Guinée, née des frustrations de la Guinée d’en bas et opposant les jeunes au torse nu armés de pierres contre les armes militaires dans des folles poursuites, une sorte ’’ d’intifada made in guinea’’ et, depuis, la grève est devenue l’épouvantail qui met la pression au régime.
Presque comme les politiques, l’esprit de ras-le-bol étreint progressivement toutes les corporations du pays huissiers, enseignants… et partout la galère est la même. En Guinée, la semaine de travail est quasiment réduite à trois jours et paralyse tout et tout le monde. Parfois, cette chienlit ressemble à un manifeste refus commun de s’extirper des ‘’conneries ‘’ d’origine politique pour faire face à l’essentiel et aux impératifs de croissance et de développement.
La rue comme unique argument de pression
Le sort de la Guinée est indéniablement lié aux luttes syndicales d’avant le non référendaire de 1958, donc la rue est presqu’une culture devenue dans ce pays. Mais faudra-t- il pour autant que les politiques manquent de vision et de solution au point d’en faire un usage abusif que la moindre occasion permet de brandir, si le combat pour le respect de la démocratie est noble, les acteurs politiques calculent- ils le risque de lasser leurs militants pour peu qu’ils ont l’esprit d’analyse et de mesurer les pour et les contre avant de s’engager ? Malheureusement non !!
La rue est devenue le contrepoids idéal aux idées et résolutions bancales que se permet de prendre le gouvernement, la rue est devenue leur épouvantail, la maison hantée qui perturbe leur sommeil. La rue a ravi la vedette à l’Assemblée dont les occupants sont occupés à se fabriquer des faveurs plutôt qu’à faire ce pourquoi ils sont là, la rue a doublé la justice elle condamne qui elle veut et comme elle veut.
Mais à en juger par les gestes, les actes, les paroles et engagements, à juger de façon neutre et à jauger le profil des prétendues solutions pour soigner le mal qui paralyse la Guinée, les candidats ne sont en rien différent de l’ivraie qu’on a eu jusque-là, tous viennent du même système.
Et si c’était l’occasion unique de renaitre pour les Forces Sociales de Guinée?
En Guinée, les forces vives évoluent en dent de scie, avec des jours sans et des jours avec. En 2007, les syndicalistes avaient forcé le respect en faisant fléchir le général Conté en le poussant à écouter le peuple et à partager ses prérogatives, le peuple peut dire merci à Ibrahima Fofana décédé et Hadja Rabiatou Sera Diallo, que ce combat a mené à conduire le conseil national de transition en lieu de l’Assemblée périmée avant de retourner de veste.
C’était le grand syndicat, aujourd’hui les coups bas et la lutte d’intérêt ont fini par avoir raison de la force syndicale. Les organisations de la société civile se sont émiettées pareillement, les partis politiques sont fragmentés et instrumentalisés par le grand manitou et c‘est dans ce contexte que la hausse du carburant est intervenue. Cette hausse de 25% est la volonté du gouvernement de faire payer au peuple la facture de son indélicatesse et de sa mauvaise gestion, chose que le peuple ne veut pas assumer.
Désormais, l’Alpha gouvernance a le cul entre deux chaises : Obéir aux injonctions de Brettons Woods et faire baver le peuple pour espérer une assistance ou faire face au courroux du peuple et se risquer à se priver d’une aide substantielle. Nœud gordien dont Kassory semble ne pas encore détenir la solution.
La coalition de la dernière chance
Avec la hausse du carburant de 2 000 francs guinéens et de façon unilatérale, Alpha Condé et les siens sont en train d’éprouver les guinéens, c’est une rusée façon de jauger la température sociale au cas où en vieux briscard, il voudrait faire un hold-up et s’éterniser au pouvoir au delà de la limite constitutionnelle.
Donc cette union des forces sociales serait elle circonstancielle, qu’elle reste une nécessité pour dire à Alpha Condé qu’ il est là par la volonté du peuple et que par cette même volonté il peut partir, des hommes et institutions se sont illustrés par le combat mené et il revient à ces forces sociales aujourd’hui de prouver par leur constance et la sincérité de leur rapport qu’elles méritent la confiance et le sacrifice du peuple, qu’elles forcent le respect et pourquoi pas l’admiration en arrachant le retour à la normale du prix du carburant car si elles n’y parviennent pas elles auront fait perdre du temps et des ressources au peuple et inutilement.
Elles n’auraient plus alors la même force de mobilisation encore moins les arguments en plus d’être ‘’mortes’’ comme l’opposition, comme une partie du syndicat, comme une bonne partie de la presse . Plus que jamais, les forces sociales ont rendez -vous avec l’histoire et dans leur position, le message est clair : C’est vaincre ou périr.
Ousmane Tkillah Tounkara